Julien Zernott, le malicieux

J’avais rencontré Julien à Paris, à l’occasion d’un salon.

Un rire étouffé nous avait rendu complices, aux dépens d’une pauvre femme qui s’était retrouvée aspergée de la tête aux pieds, suite à la maladresse d’un dégustateur déjà bien échauffé…

C’était l’hiver dernier, et j’avais alors soigneusement noté les coordonnées de ce géant bouclé, qui semblait non seulement ne pas manquer de malice, mais qui était aussi un vigneron du Languedoc… aux vins rouges qui tâchent généreux.

Heureux hasard, Julien fait partie de la même bande de copains-vignerons-un-peu-fêlés dont j’avais prévu de faire le tour lors de mon escapade du début de printemps : oui, oui, encore un vigneron des Terrasses du Larzac !

Avec Olivier, Géraldine (article à venir !), Vincent et Isabelle, ils forment le socle d’une petite bande unie autour de la passion du terroir, de la volonté d’aller toujours plus loin et… de l’amour du rugby.

Oui.

Cette bande de joyeux lurons est capable de se réunir pour écouter les conseils avisés d’un expert en greffage, tout autant que pour supporter leur équipe préférée à l’Altrad Stadium de Montpellier.

Mais revenons-en à Julien, et à ce domaine au nom quand même pas commun, le Pas de l’Escalette.

Si pour Julien, le vin c’était un chemin tout tracé, s’installer LÀ, dans cette micro-AOC planquée dans cette immeeeeense région viticole qu’est le Languedoc, c’était loin d’être une évidence.

En fait, c’est avec sa dulcinée, Delphine, qu’ils ont eu le coup de foudre pour le coin.

À la recherche d’un endroit où créer leur domaine, ils empruntaient régulièrement l’autoroute A75, et apercevaient de loin ces coteaux en terrasses absolument sublimes… Ils voulaient de vieilles vignes et un terroir frais… C’est au coeur des Terrasses du Larzac qu’ils ont trouvé leur pépite.

Après un diplôme en oenologie à Dijon et 13 années à dispenser ses conseils pour le domaine Pellé à Menetou-Salon, Julien voulait faire son propre vin. Un challenge personnel, mais aussi une jolie histoire à deux, puisque Delphine était jusque-là… attaché de presse.

Ceci explique cela, me direz-vous, quand vous découvrez la qualité de la com’ du domaine 😉

Mais madame ne reste pas derrière le bureau, d’autant plus que, pendant 5 ans, Julien faisait les allers-retours Loire-Larzac toutes les semaines. Il fallait bien que quelqu’un assure… tout le reste. D’ailleurs, pour signifier qu’elle n’est pas que « la femme de », Delphine a élaboré sa propre cuvée, « Le pas de D. »

Un vin qui m’avait immédiatement séduite, lors de ma découverte du domaine en novembre dernier.

Tous les vins du domaine sont certifiés bio. « Je ne veux pas de cochonneries chimiques, ni pour ma santé, ni pour celle de mes gars. Et puis, deuxième raison, toute simple : je trouve que les vins que je goûte en bio sont meilleurs ! »

Julien m’offre le grand tour : nous nous promenons dans le village de Pégairolles-de-l’Escalette (#payetonnom), où ils se sont installés quand ils sont arrivés en 2003 avec Delphine, dans un appartement tout exigü…

« C’est beau l’amour… » me glissera-t-il, un brin rieur, en souvenir de ces années un peu folles…

Au fil de notre boucle Julien me présente plusieurs de ses parcelles, chacune a sa petite anecdote, son histoire. Celle-ci ce sont les vieux pieds de vigne, celle-là, on peut y manger des cerises à la pause pique-nique, celle-ci, c’est celle qu’ils voyaient au loin quand ils passaient en voiture…

Cette expérience dans la Loire est de celle qui l’ont construit, durablement. Il a commencé auprès du père, il a poursuivi avec le fils, après le décès brutal du premier. Les Pellé ? « C’est ma deuxième famille ».

On termine par la visite de la cuverie, où j’ai le grand bonheur de déguster les vins en cours d’élevage. C’est un jour magnifique pour la dégustation : il fait beau, le ciel est clair, les vins « goûtent merveilleusement bien », comme on dit…

Difficile de donner ma préférence, tant je suis convaincue par les vins du domaine… Ils conjuguent soleil et fraîcheur, générosité et élégance. C’est complexe et accessible à la fois, c’est tout bonnement délicieux. Si je devais donner mon top 3 (quand même !), il y aurait le brut de cuve 2016 issu de la parcelle Les Freys (assemblage Carignan / Mourvèdre / Grenache), le Clapas Rouge encore en fût, hyper gourmand, mais aussi le Clapas 2015, plus dans la minéralité, mais avec une complexité incroyable.

Julien s’était fait une promesse : « Chaque bouteille qui sortira du domaine, il faudra que j’ai envie de la boire avec des copains ».

Eh bien moi, je veux bien faire partie de la bande.


Les yeux malicieux, le regard sérieux
: avec Julien, entre deux éclats de rire, on discute des choses essentielles. Le vin, le partage, les projets.

Un vigneron à découvrir, et à suivre.

Julien, c’est aussi un grand gourmand : il chouchoute les quelques arbres fruitiers qu’il a planté en bordure de parcelle autant que ses pieds de vigne : figuiers, câpriers, et surtout cerisiers… Cette diversité, c’est une autre des raisons de l’achat, avec Delphine.